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M. Henrique Rodas
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When actors refer to Bosman ruling
In France, as in so many other countries, it happens that actors from the world of football ascribes through the media and public supports incidents such as, the explosion of the trade of transfers, the football player’s wages or the sports TV rights, to the Bosman ruling. Some even ascribe to the Bosman ruling the rise of individualism among professional players, or the beginning of a new type of managers being more opportunists and forgetting the sense of moral values of “the family of football”. Often when the major evolutions of international professional football are evaluated, a reference to the Bosman ruling is made as a decisive law for its enactment.
However, when analyzed, the transformations in question are not transformations that happened after the European Court of Justice decision, but they appeared in relation to successive changes, interdependent or not . In their perception of the effects of the Bosman ruling actors redefined what was at stake.
Following actors in disputes, when arguments are given for qualifying the football, we will follow the hypothesis that underlines that social actors consider the Bosman ruling to be an event that reconfigures. In that perspective, by determining traits of a before and after, the expressions such “since the approval of the Bosman ruling” are asserted by actors as a wish to delimit their perception of the real (Chateauraynaud & Doury, 2010).
A part of my researches describes and analyzes the content of polemics in France about freedom of movement for football players by following the arguments and justifications given by the social actors.
La liberté de circulation dans le football européen
Dans les médias ou d'autres supports publics, il arrive que les acteurs du monde du football imputent à l'arrêt Bosman l'explosion du marché des transferts, celle des salaires de footballeurs, ou celle des droits de retransmission télévisée. Il arrive également de lui attribuer l'émergence de l'individualisme chez les footballeurs professionnels, ou la venue d'un nouveau type de dirigeants, arrivistes et moins enclins à partager les valeurs de « la famille du football. » Lorsqu'ils évaluent certaines des dernières évolutions majeures du football professionnel international, la plupart fait référence à l'arrêt comme s'il avait été décisif dès son édiction. Or, à bien y regarder, c'est-à-dire en nous penchant sur le contenu de leurs arguments, les transformations dont il est question, ne sont pas survenues au lendemain de l'arrêt de la CJCE mais bien à la suite de changements successifs, symétriques, interdépendants ou non. Et, la perception des effets de l'arrêt a nécessité, dans bien des cas, la reformulation des enjeux du milieu compte tenu de la voie qu'induisaient ces changements. Bien à la suite des controverses, lorsqu'il s'agit de s'accorder pour qualifier le milieu, nous ferons l'hypothèse que les acteurs éludent la série de détails du changement en s'appuyant sur un événement reconfigurateur. Et, dans cette perspective, en déterminant les traits caractéristiques d'un avant et d'un après, l'expression de type « depuis l'arrêt Bosman » renvoie à la nécessité de l'acteur qui l'énonce à un désir de recadrer pour chacun leur perception du réel (Chateauraynaud & Doury, 2010).
Il en résulte qu'éluder ces détails amène les acteurs à faire de l'arrêt Bosman une épreuve marquante pour le monde du football. Cet arrêt participe de près ou de loin à un ensemble de transformations du monde du football. Notre travail consiste à instruire le contenu des raisons du détail en suivant les arguments et les justifications dans le cours de l'action.
En suivant ce cours, nous en venons à formuler la dynamique des transformations. Dans nos études nous avons analysé l'exemple de la création en France du « Contrat espoir ». Ce contrat de cinq ans est créé dans l'urgence en avril 1997 afin que les clubs « préservent » leurs jeunes footballeurs talentueux. Les instances du football colmataient alors une brèche ouverte par l'arrêt Bosman. En effet, quelques semaines plus tôt, Nicolas Anelka, encore mineur et en fin de contrat quittait librement le PSG sans son accord pour rejoindre l'Arsenal. Les instances et les dirigeants français n'avaient pas prévu que cela pouvait être possible. Que prévoyaient-ils ? Dans quelle mesure, ce qu'ils comprenaient au fur et à mesure des changements introduits par l'arrêt Bosman ne leur avait-il pas permis d'envisager ce type de départ ? Sur quels types d'éléments tangibles s'appuyaient-ils pour construire leurs jugements ? La résolution de ces questions renvoie principalement à des enjeux de développement d'une sociologie de la description et de l'analyse des disputes dans le sport saisies comme processus de transformation.
Nous avons montré qu'à la suite d'une épreuve marquante, un temps est nécessaire au renouvellement de la définition du sens commun sur lequel s'accorder ; de même que cette définition est toujours soumise à des variations d'ajustements avec les autres milieux. Si bien que pour donner à comprendre ces variations, il est nécessaire de mobiliser une sociologie pragmatique de la perception, de l'alerte et des risques.
De manière semblable, il arrive qu'en remettant en cause ce qui va de soi, les acteurs aient la volonté de le transformer, au moins de telle sorte que les choses leur paraissent plus justes. Nous le montrerons à travers l'affaire Mexès où le footballeur use de la désobéissance civile pour plaider sa cause. Footballeur professionnel durant tout le conflit l'opposant à son club (Auxerre), il mobilise les instances à sa disposition tout en refusant les pratiques établies qui le gouvernent. Ainsi, un des moyens de plaider sa cause consiste à rompre avec un certain nombre de conceptions partagées, ou qui se sont plus ou moins durablement laissées accepter. Une sociologie de la désobéissance civile nous permet de décrire la trajectoire par laquelle les acteurs entrent dans le déni de l'ordre établi.
Finalement, la réunion des cas étudiés révèle des initiatives individuelles dont l'arrière plan discute l'application de la liberté de circulation. Et, tandis qu'ils revendiquent leur cause personnelle pour davantage de justice les concernant, nous pouvons nous demander quels éléments font en sorte qu'on assiste à l'ouverture de débats réexaminant l'ordre établi notamment autour de questions qui dépassent les footballeurs. Il résulte que l'ensemble de ces axes met en exergue ce que font les acteurs lorsqu'ils questionnent ce qui jusqu'ici pouvait leur sembler aller de soi ; de même qu'on parvient à questionner comment un simple cas en vient à reconfigurer le football et par là, à impulser et à engager des changements sociaux.
When actors refer to Bosman ruling
In France, as in so many other countries, it happens that actors from the world of football ascribes through the media and public supports incidents such as, the explosion of the trade of transfers, the football player’s wages or the sports TV rights, to the Bosman ruling. Some even ascribe to the Bosman ruling the rise of individualism among professional players, or the beginning of a new type of managers being more opportunists and forgetting the sense of moral values of “the family of football”. Often when the major evolutions of international professional football are evaluated, a reference to the Bosman ruling is made as a decisive law for its enactment.
However, when analyzed, the transformations in question are not transformations that happened after the European Court of Justice decision, but they appeared in relation to successive changes, interdependent or not . In their perception of the effects of the Bosman ruling actors redefined what was at stake.
Following actors in disputes, when arguments are given for qualifying the football, we will follow the hypothesis that underlines that social actors consider the Bosman ruling to be an event that reconfigures. In that perspective, by determining traits of a before and after, the expressions such “since the approval of the Bosman ruling” are asserted by actors as a wish to delimit their perception of the real (Chateauraynaud & Doury, 2010).
A part of my researches describes and analyzes the content of polemics in France about freedom of movement for football players by following the arguments and justifications given by the social actors.
La liberté de circulation dans le football européen
Dans les médias ou d'autres supports publics, il arrive que les acteurs du monde du football imputent à l'arrêt Bosman l'explosion du marché des transferts, celle des salaires de footballeurs, ou celle des droits de retransmission télévisée. Il arrive également de lui attribuer l'émergence de l'individualisme chez les footballeurs professionnels, ou la venue d'un nouveau type de dirigeants, arrivistes et moins enclins à partager les valeurs de « la famille du football. » Lorsqu'ils évaluent certaines des dernières évolutions majeures du football professionnel international, la plupart fait référence à l'arrêt comme s'il avait été décisif dès son édiction. Or, à bien y regarder, c'est-à-dire en nous penchant sur le contenu de leurs arguments, les transformations dont il est question, ne sont pas survenues au lendemain de l'arrêt de la CJCE mais bien à la suite de changements successifs, symétriques, interdépendants ou non. Et, la perception des effets de l'arrêt a nécessité, dans bien des cas, la reformulation des enjeux du milieu compte tenu de la voie qu'induisaient ces changements. Bien à la suite des controverses, lorsqu'il s'agit de s'accorder pour qualifier le milieu, nous ferons l'hypothèse que les acteurs éludent la série de détails du changement en s'appuyant sur un événement reconfigurateur. Et, dans cette perspective, en déterminant les traits caractéristiques d'un avant et d'un après, l'expression de type « depuis l'arrêt Bosman » renvoie à la nécessité de l'acteur qui l'énonce à un désir de recadrer pour chacun leur perception du réel (Chateauraynaud & Doury, 2010).
Il en résulte qu'éluder ces détails amène les acteurs à faire de l'arrêt Bosman une épreuve marquante pour le monde du football. Cet arrêt participe de près ou de loin à un ensemble de transformations du monde du football. Notre travail consiste à instruire le contenu des raisons du détail en suivant les arguments et les justifications dans le cours de l'action.
En suivant ce cours, nous en venons à formuler la dynamique des transformations. Dans nos études nous avons analysé l'exemple de la création en France du « Contrat espoir ». Ce contrat de cinq ans est créé dans l'urgence en avril 1997 afin que les clubs « préservent » leurs jeunes footballeurs talentueux. Les instances du football colmataient alors une brèche ouverte par l'arrêt Bosman. En effet, quelques semaines plus tôt, Nicolas Anelka, encore mineur et en fin de contrat quittait librement le PSG sans son accord pour rejoindre l'Arsenal. Les instances et les dirigeants français n'avaient pas prévu que cela pouvait être possible. Que prévoyaient-ils ? Dans quelle mesure, ce qu'ils comprenaient au fur et à mesure des changements introduits par l'arrêt Bosman ne leur avait-il pas permis d'envisager ce type de départ ? Sur quels types d'éléments tangibles s'appuyaient-ils pour construire leurs jugements ? La résolution de ces questions renvoie principalement à des enjeux de développement d'une sociologie de la description et de l'analyse des disputes dans le sport saisies comme processus de transformation.
Nous avons montré qu'à la suite d'une épreuve marquante, un temps est nécessaire au renouvellement de la définition du sens commun sur lequel s'accorder ; de même que cette définition est toujours soumise à des variations d'ajustements avec les autres milieux. Si bien que pour donner à comprendre ces variations, il est nécessaire de mobiliser une sociologie pragmatique de la perception, de l'alerte et des risques.
De manière semblable, il arrive qu'en remettant en cause ce qui va de soi, les acteurs aient la volonté de le transformer, au moins de telle sorte que les choses leur paraissent plus justes. Nous le montrerons à travers l'affaire Mexès où le footballeur use de la désobéissance civile pour plaider sa cause. Footballeur professionnel durant tout le conflit l'opposant à son club (Auxerre), il mobilise les instances à sa disposition tout en refusant les pratiques établies qui le gouvernent. Ainsi, un des moyens de plaider sa cause consiste à rompre avec un certain nombre de conceptions partagées, ou qui se sont plus ou moins durablement laissées accepter. Une sociologie de la désobéissance civile nous permet de décrire la trajectoire par laquelle les acteurs entrent dans le déni de l'ordre établi.
Finalement, la réunion des cas étudiés révèle des initiatives individuelles dont l'arrière plan discute l'application de la liberté de circulation. Et, tandis qu'ils revendiquent leur cause personnelle pour davantage de justice les concernant, nous pouvons nous demander quels éléments font en sorte qu'on assiste à l'ouverture de débats réexaminant l'ordre établi notamment autour de questions qui dépassent les footballeurs. Il résulte que l'ensemble de ces axes met en exergue ce que font les acteurs lorsqu'ils questionnent ce qui jusqu'ici pouvait leur sembler aller de soi ; de même qu'on parvient à questionner comment un simple cas en vient à reconfigurer le football et par là, à impulser et à engager des changements sociaux.
Mis à jour le 11 janvier 2020